BRUYÈRE Jean Michel
Artiste majeur du festival en 2006, Jean Michel Bruyère y présente deux créations : « 7 Fuites du Paysage », conçue pour la Chapelle des Pénitents Blancs à Aix-enProvence, et « Une défaite », pour la Galerie 200RD10. Le festival montre également « Si Poteris Narrare, Licet », film réalisé en 2002 pour le iCinema. Jean Michel Bruyère anime le groupe LFK, où se croisent intellectuels et artistes de différentes disciplines et de différentes nationalités. En 1996, il fonde Man-keneen-ki, clinique, maison et école d’art des enfants et jeunes errants de Dakar.
« 7 Fuites du Paysage » de Jean Michel Bruyère [Fr] / Création Cézanne 2006 / Installation à la Chapelle des Pénitents Blancs, Aix-en-Provence.
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Présentée dans la Chapelle des Pénitents Blancs, cette installation n’appartient à aucune catégorie bien définie des disciplines de l’art. Depuis plus de quinze ans, le mythe de la perdition d’Actéon est la seule « explication du monde » que reconnaisse Jean Michel Bruyère. Surprise à son bain par Actéon, sur les hauteurs de Gargaphie, Diane, selon Ovide, dit au jeune chasseur : « va et raconte que tu m’as vue sans voile. Si tu peux le dire, j’y consens - Si Poteris Narrare, Licet ».
Des mots cyniques pour une fin cynique ; au même instant, elle transforme Actéon en cerf et l’abandonne, sous cette forme, à la réaction de sa meute - cinquante chiens de chasse s’acharnant sur leur maître devenu fauve. Actéon tente de fuir, se débat, voudrait se faire reconnaître, mais il meurt, dispersé par ses propres bêtes. C’est plus particulièrement aux chiens d’après le festin que Jean Michel Bruyère s’intéresse. Chiens errants libérés de l’homme qu’ils aimaient et qu’ils mangèrent au moment précis où celui-ci rencontrait un absolu de la pensée d’une nature intacte. Bruyère et LFK inventent et réinventent sans cesse un peuple cynique, métamorphose de la meute d’Actéon en humanité incertaine, errant dans le langage. Jean Michel Bruyère envisage le monde contemporain depuis cette seule part mythique, secrète et clandestine : un festin d’initié dont l’initié est la viande.
« Si Poteris Narrare, Licet » de Jean Michel Bruyère [Fr] conçu pour le iCinéma de Jeffrey Shaw [Au] / Installation interactive (2002).
Conception et réalisation : Jean Michel Bruyère / Musiques et Chants : Thierry Arredondo / Scéographie 3D : Patrick Sanoli / Montage sonore : Jean Luc d’Aléo / Production : Epidemic, ZKM (Institute for Visual Media), LFK La fabriks, CICV Pierre Schaeffer / Coproduction : Théâtre du Merlan, festival Exit-Maison des Arts de Créteil, Festival Via – Le Manège Scène nationale de Maubeuge, Fournos Center Art and New technologies, Athènes .
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Sous le faisceau du projecteur du iCinema, nous est révélée toute la complexité de la mise en image du mythe fondateur de Diane et Actéon. Oeuvre monumentale produite pour le ZKM, centre d’art et de recherche numérique en Allemagne, le iCinéma est une technologie révolutionnaire développée par Jeffrey Shaw et qui vise à mettre en place un cinéma immersif et interactif, unique par ses caractéristiques et ses possibilités créatrices. Jean Michel Bruyère est le premier à relever le défi de la création au travers de cet outil et réalise le film « Si Poteris Narrare, Licet », une architecture « cynétique » de 360°, composant ensemble 126 films de 6 minutes. Un spectateur-pilote explore le film à travers une « fenêtre de projection » dont la mobilité est asservie à celle de son regard posé sur la surface du dôme. Le corps entier du spectateur s’engage alors dans un nouvel exercice de la représentation.
« Une défaite » de Jean Michel Bruyère [Fr] / Création Cézanne 2006 / Installation à la Galerie 200RD 10, Vauvenargues.
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Les pages d’« Acedia » (Jean Michel Bruyère, Éditions Sens et Tonka, 2005) sont tracées à l’encre de chine sur les murs de la galerie 200 RD 10. Éloge de l’errance et de la clandestinité, le texte, sous cette forme plastique, oblige le lecteur à engager son corps dans un mouvement de marche circulaire et plusieurs fois recommencée à travers les trois pièces superposées de la galerie et à suivre physiquement le sens à la trace. Quelques rares éléments sculptés, vidéos et photographiques complètent le paysage que le texte pariétal à la fois décrit et, en soi, constitue